Trouble borderline état limite.


Borderline, comment je suis passé(e) de la souffrance extrême au renoncement
ou
Comment je suis passé(e) de l'espoir vain à la croyance que c'était ma nature, donc au renoncement.

Témoignage :

Je vais essayer de vous faire comprendre en imageant quelque peu.
J’ai assez vite pris conscience qu’un "mur" existait entre les autres et moi.
Ce mur était transparent et je pouvais voir les autres, vivre, s’amuser, sortir avec les copains, être heureux.
Moi, j’étais comme une "couillone" derrière ce mur, sortant peu, ayant peu d’amis, et m’amusant peu quand je sortais.
Pendant des années, de 17 ans à 23 ans je dirais, j’ai voulu briser ce mur.
J’essayais de passer de l’autre coté, je voyais bien que je n’étais pas heureuse et que je gâchais ma vie, que la vraie vie, c’était l’autre coté.
Alors j’ai voulu pour briser ce mur, mais il était incassable, c’était épuisant, j’ai voulu en sortir, en demandant de l’aide, en espérant.
Chaque jour j’espérais que j’allais changer, passer de l’autre coté. Quand j’arrivais à me faire des amis, à sortir, je me disais " ça y est, je deviens comme les autres ".
A chaque fois, la déception n’en était que plus cruelle quand je voyais que je perdais mes amis, qu’ils ne m’appelaient plus, ou que les sorties, en boite ou ailleurs, m’ennuyaient au plus haut point.
C’était encore pire que quand j’étais restée seule, car je retombais sans arrêt, j’avais eu de l’espoir qui s’était éteint, un peu comme si vous montiez un mur et que vous retombiez, plus vous êtes haut plus ça fait mal.
C’était ça, ma jeunesse…

De temps en temps j’avais quand même des moments sympas, je sortais avec des mecs aussi bien sur, mais globalement je n’arrivais pas au bonheur simple des autres, derrière le mur.

C’était l’horreur, tout n’était que déception.
A chaque fois, je me disais " ça y est, j’ai des amis, je vais sortir et faire comme tout le monde ".
A chaque fois, déception, la soirée m’avait profondément ennuyée, ou alors je m’étais amusée au prix d’une bonne cuite ou pire.
De temps en temps même j’avais une vie de quasi débauchée, je n’entre pas dans les détails, ça durait un mois ou deux et ça me laissait encore plus dégoûtée de moi-même et de la vie, je m’étais avilie sans en retirer le moindre plaisir.
Ce combat pour trouver le bonheur me faisait énormément souffrir, car je voyais bien que je n’y arrivais pas. J’avais des moments de déprime terrible et d’envie d’en finir, mais à chaque fois j’espérais changer, à chaque fois je retombais.

Cela a duré à peu prés 7 ans, et puis progressivement, je me suis résigné à ne pas vivre comme les autres, je me suis dit " c’est pas mon truc, c’est ma nature, je vais essayer de me contenter de ce que j’ai ".

J’ai été renforcée dans cette idée que je n’y changerais rien, que c’était ma nature par mes parents eux-mêmes qui me disaient " bon, tu es solitaire c’est comme ça, après tout tu te suffis à toi-même, il y a des gens comme ça ".
Je pense qu’ils essayaient de se rassurer. Oui c’est ça, en fait, c'est moins pour rassurer le malade que pour se rassurer eux-mêmes, car voyez-vous, ils savaient que ce n'était pas normal de ne pas sortir, ils voyaient que je ne pouvais pas être heureuse (j'ai revu quelques photos de moi à cet age, on voit le malheur peint sur le visage sur quelques-unes unes) donc ils se mentent car ils ne savent pas quoi faire, mais je sais que ça inquiétait quand même beaucoup mes parents de me voir vivre comme ça "mais sors, amuse-toi, c'est de ton age" d'où mes mensonges de fausses sorties... et après finalement "c'est ta nature".


J’ai fini par les croire et me dire qu’effectivement, c’était ma nature et qu’il fallait faire avec.
Donc j’ai accepté de rester de mon coté du mur, de ne pas vivre finalement, mais au moins je souffrais nettement moins puisque je n’avais plus d’espoir.


Quand on renonce au bonheur ça ne rend pas plus heureux mais je dirais moins malheureux.
Je suis passée de très malheureuse à pas vraiment heureuse. Je continuais à souffrir bien sur, l’impulsivité, l’angoisse, les colères, les sentiments de vide et d’ennui, mais je n’avais plus de spleen ni d’envie suicidaire.
J’étais résignée, je vivotais comme ça, au jour le jour, indifférente presque au temps qui passait. Maintenant que j’ai pris conscience qu’il n’y a pas de mur mais que c’est une maladie, j’ai grand espoir de vivre enfin, c’est pourquoi je me remets à souffrir comme du temps de ma prime jeunesse. Pour la première fois depuis des années, j’ai refais un spleen et j’ai eu envie de mourir. Mais ça a passé, et au moins je sais qu’au bout il y a une lueur.
C’est que, quand j’avais 18 ans, j’essayais de changer seule, je n’avais aucune chance, maintenant j’ai trouvé un psy, et ensemble je suis sure que j’arriverais à m’en sortir.


Q: Ce sont les échecs successifs qui font renoncer ou la souffrance entraînée par l'échec qui entraîne le renoncement ?


Ce sont les deux raisons, à 50%. Les échecs font mal car on espère, pour se planter, ça fait mal, ça m'amenait d'ailleurs toujours à percevoir les autres comme "méchants", c'était la déception, plus dure est la chute quand l'espoir est grand.
La souffrance directe et indirecte entraînée par ces échecs, ruminations négatives, ou spleen, angoisses, ça aussi c'est très dur, mais je dirais que ce sont vraiment les deux. Les échecs amènent fatalement à se remettre en question, je crois que ça aussi ça m'était un peu impossible.


Q: Une liste virtuelle est-elle établie "ca c'est pour moi, ca c'est pour moi ca non c'est pas pour moi" ?


Je ne pense pas m'être posé le problème comme ça, puisque je continuais malgré tout à fantasmer sur une vie meilleure, mais sans y croire vraiment et sans rien faire pour en tous cas.


Q: Ce renoncement finit par ce transformer en deuil de... comme vous auriez pu dire "les enfants c'est pas pour moi j'en aurais jamais", c'est à dire qu'une page est tournée, c'était un état de renoncement définitif, comme devenir paralysé après un accident de voiture ?


Non, pas vraiment, je vous dis que je rêvais parfois d’une autre vie, à une autre Elodie, au milieu d'amis, la seule différence c'est que je me doutais que ça n'arriverait probablement jamais, j'ai cessé de faire des efforts pour y arriver, mais j'espérais sans y croire. Vous citiez l'exemple du paralysé, et bien je pense que même lui a l'espoir vague de remarcher un jour, ça l'aide plus ou moins à continuer.

Moi c'était pareil, je savais bien que ça n'arriverait probablement jamais mais je gardais un espoir bien imaginaire, sans rien faire pour, ça m'aidait à continuer. Disons qu'avant je me disais "il faut que je change", et après "je changerais peut-être un jour, mais ma nature est d'être comme ça, je ne peux rien y faire, si je dois changer ça se fera tout seul". Voila. Un peu comme un condamné à perpète qui rêve de sa liberté future, ça lui sert juste à l'empêcher de crever.


Q: C'est totalement conscient ou insidieux, petit à petit à coups d'échecs ?


C'est totalement insidieux et inconscient, puisque ce n'est qu'aujourd'hui que j'analyse mes comportements.

Disons que j'ai rencontré mon conjoint, je me suis mariée, j'ai fait des gosses, donc j'avais au moins une façade tranquille, personne ne me posait plus de question "tu sors jamais ?" etc, on me foutait la paix et finalement, petit à petit, j'avais mari, enfant, boulot, je n'avais à penser à rien, qu'à bosser, me lever, etc.. Alors j'ai fini par me dire que j'avais enfin une vie à peu prés normale, de l'extérieur tout au moins.
Pour le reste je m'étais fait une raison, je n'avais plus besoin de faire semblant de m'éclater c'était moins fatigant !

Avec l'aimable collaboration d'Elodie


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